P comme… phares en mer, phares à terre

Dans un premier article consacré aux phares nazairiens, je vous ai présenté les quatre phares que l’on peut facilement voir en se promenant sur le bord de l’estuaire et le long du front de mer de Saint-Nazaire, du Vieux Môle à Villès-Martin (retrouvez l’article ici). Ces phares jalonnent l’arrivée au port.

Pour voir les autres phares nazairiens, qui jouent encore aujourd’hui un rôle important pour la navigation dans l’estuaire de la Loire, il faudra soit vous promener sur le chemin des Douaniers, soit naviguer dans l’estuaire de la Loire, par exemple en profitant pendant l’été des croisières commentées de Saint-Nazaire Agglomération Tourisme.

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Des ouvrages des 18e et 19e siècles dans l’estuaire

Ces phares vous réservent plus d’une surprise : saviez-vous que deux de ces ouvrages ouvrages  sont inscrits aux Monuments Historiques ? Et que l’un d’eux constitue même le plus ancien ouvrage situé dans l’estuaire de la Loire ? Ce dernier n’est pas exactement un phare mais une « tourelle », la tourelle des Morées. Cet ouvrage en pierres de taille maçonnées a été construit dès 1777 puis rehaussé et équipé d’un feu en 1893.

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Un peu plus loin vers l’extérieur de l’estuaire se dresse le très beau phare du Grand Charpentier (également inscrit aux Monuments Historiques) qui signale un banc rocheux et fait aussi partie du jalonnement du chenal de navigation. Une première tourelle en maçonnerie, datant de 1851 et trop souvent endommagée par les tempêtes, a finalement été remplacée par ce grand phare, construit entre 1884 et 1888. Il a été dessiné par l’ingénieur René Kerviler à qui on doit notamment le bassin de Penhoët dans le port de Saint-Nazaire. Le Grand Charpentier est visible de loin puisqu’il s’élève à 23 m au-dessus de la mer. Son signal porte jusqu’à 14 milles nautiques.

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Le phare de l’Aiguillon, un phare à terre, date lui aussi du 18e siècle. Premier phare de l’estuaire, il a été construit en 1756, à la demande du duc d’Aiguillon. Il est installé à 34 m au-dessus de la mer et porte une des plus vieilles lentilles de Fresnel (1857) toujours en fonctionnement en France.

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Une histoire d’alignement(s)

L’alignement, dans un contexte maritime, désigne une technique de navigation : on identifie dans le paysage deux amers, des points de repères fixes indiqués sur la carte maritime, et on se laisse guider par l’alignement formé par ces repères. Ils sont toujours très visibles, souvent un phare, parfois même un clocher.

Oui mais… quand le tracé du chenal de navigation change, notamment pour accueillir des navires d’un tirant d’eau de plus en plus important, les amers doivent changer également pour permettre une navigation en toute sécurité et guider les navires sur leur nouvelle route. L’estuaire de la Loire a connu trois chenaux différents, le premier dès le milieu du 18e siècle, le deuxième à partir de 1898 et le chenal actuel, depuis 1981. A chaque fois, certains phares et feux étaient désaffectés, de nouveaux ouvrages construits.

Ainsi, pendant presque un siècle, jusqu’en 1980, ce joli petit bâtiment situé sur le chemin des Douaniers…

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a servi de feu intermédiaire entre un feu avancé en mer (qui n’existe plus) et le phare de Kerlédé (ci-dessous), situé à 800 mètres dans les terres. Avez-vous vu la qualité architecturale de ce petit bâtiment utilitaire ? La lanterne était placée derrière la petite fenêtre ronde du fronton triangulaire. Ce feu intermédiaire et le phare de Kerlédé ont été désaffectés au début des années 1980.

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Sur la photo suivante on peut observer trois éléments représentant deux époques : dans l’eau, la structure blanche est le feu avancé de Porcé qui s’aligne avec le grand phare blanc (presque en forme de fusée) que l’on distingue sur la côte à droite. Le grand phare gris qui dépasse de la végétation, la Tour du Commerce, était en service jusqu’en 1896.

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Gros plan sur deux phares très différents qui semblent se toiser grâce aux photos juxtaposées : la Tour du Commerce, désaffectée depuis la fin du 19e siècle, et l’actuel phare de Porcé dont la haute tour métallique, avec ses panneaux latéraux, ne ressemble pas tout à fait à l’image typique du phare.

Paradis ou enfer ?

A l’exception du Grand Charpentier, les phares nazairiens de l’estuaire sont des phares à terre, installés soit près de la côte (Aiguillon, Porcé), soit à plusieurs centaines de mètres dans les terres, comme la Tour du Commerce et le phare de Kerlédé. Ces deux derniers sont situés de part et d’autre de la route de la Côte d’Amour : vous voyez que l’environnement du phare de Kerlédé est tout à fait urbain !

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Dans le langage des gardiens de phare, les phares de terre, comprenant souvent le logement pour le gardien et sa famille, étaient surnommés « le paradis », à l’opposé de « l’enfer » que représentaient les phares en mer. Les grands phares notamment au large des côtes finistériennes étaient redoutés : des semaines de solitude, des phares exposés aux éléments déchaînés à tel point que la relève ne pouvait pas toujours être assurée.

Si l’estuaire de la Loire connaît des tempêtes, on est loin de ces conditions apocalyptiques. D’ailleurs, les phares sont tous automatisés maintenant, ils n’ont de la visite que de temps en temps pour des travaux de maintenance : sur cette photo on distingue le bateau des Phares et Balises amarré devant le Grand Charpentier.

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Une conclusion ? On aime les phares pour leur côté pittoresque, leur taille souvent impressionnante, pour tout ce qu’ils nous disent sur notre relation à la mer. Mais ils représentent bien plus que cela. Malgré toutes les aides électroniques à la navigation qui existent aujourd’hui, les phares, tourelles, feux, balises, sont toujours des éléments incontournables de la signalisation maritime, ne serait-ce que pour recouper les données ou en cas de panne de l’équipement électronique. Leurs signaux lumineux si réguliers qui percent la nuit ont quelque chose de rassurant, et pas seulement pour les navigateurs.

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>>> Pour écrire mes deux articles sur les phares, le livre édité en 2012 par l’Université Inter-Ages de Saint-Nazaire, Saint-Nazaire, Douze promenades pour découvrir son patrimoine, m’a été très utile. Une vraie mine d’explications et d’informations sur de nombreux aspects de l’histoire et du patrimoine nazairiens ! J’ai également consulté la partie consacrée aux phares et balises du site de la Direction interrégionale de la Mer – Nord Atlantique / Manche Ouest (DIRM NA MO) où j’ai notamment  trouvé un livret sur les phares de cette Direction interrégionale, à consulter ici.

>>> Retrouvez les phares de terre sur cette carte.

A lire aussi sur ce blog le premier article consacré aux phares nazairiens : P comme phares / du Vieux Môle à Villès-Martin.

 

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